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Alors que beaucoup s’accordent à dire que bien respirer est important lorsqu’on réalise un effort, une méthode qui a fait l’objet de plusieurs études scientifiques ces dernières années préconise de s’entraîner de temps en temps en limitant volontairement sa respiration ( hypoventilation ). Quels peuvent donc être les avantages de ce type d’entraînement et à quels sportifs s’adresse t-il ?

Il existe certaines situations où l’air arrive dans les poumons en quantité insuffisante. On parle alors d’hypoventilation. Cela peut se produire lorsqu’on souffre de certaines pathologies, telles que des maladies respiratoires. C’est également le cas si on décide de volontairement moins respirer. L’entraînement en hypoventilation illustre parfaitement ce second exemple. Cette méthode consiste en effet à réduire l’apport d’air en cours d’effort, en effectuant des blocages respiratoires de quelques secondes. Elle peut être appliquée en pratiquant l’aquabiking et même en nageant, en courant, en ramant ou en patinant ! Quel intérêt peut-il donc y avoir à diminuer son rythme respiratoire naturel ?

Les effets en cours d’exercice

Lorsqu’on réalise un exercice en hypoventilation, deux effets majeurs se produisent dans l’organisme

  • une augmentation des concentrations en dioxyde de carbone (CO2)
  • une diminution des concentrations en oxygène (O2)

En ce qui concerne le taux de CO2, il augmente toujours quelle que soit la manière dont on retient sa respiration. En revanche, l’oxygène ne diminue pas, ou alors très faiblement, si les poumons sont remplis d’air au moment où on bloque sa respiration. Pour obtenir une diminution significative de l’oxygénation du corps, il faut que les blocages respiratoires se fassent avec des poumons partiellement vides. Pour cela, il faut d’abord effectuer une expiration puis bloquer sa respiration. C’est la technique du expirer-bloquer. Les recherches ont montré que lorsque l’hypoventilation est appliquée selon cette technique, la diminution de l’oxygène est comparable à ce qu’on enregistre à plus de 2­000 m d’altitude !

Un aspect particulièrement intéressant de cette méthode est donc de simuler des conditions d’altitude sans quitter le niveau de la mer et sans utiliser d’appareils particuliers.

La baisse de l’oxygène, associée à l’augmentation du CO2, va avoir pour effet de générer une acidose importante en cours d’exercice, à la fois dans le sang et dans le muscle. Cette acidose est à l’origine des principales adaptations obtenues après la période d’entraînement.

expirer-bloquerhttp://www.hypoventilation-training.com/

Les effets obtenus après entraînement

Après une période d’entraînement en hypoventilation, on constate une réduction du niveau d’acidité dans l’organisme quand on effectue un effort très intense en respirant normalement.

La diminution de l’acidose est due aux adaptations physiologiques qui se produisent au fil des semaines d’entraînement !

L’acide lactique s’accumule moins vite, notamment grâce à une amélioration de la capacité tampon.

La fatigue apparaît donc plus tardivement et la performance est améliorée.

Les études ont rapporté des gains de performance de 1 à 4 % chez des nageurs et des coureurs à pied après plusieurs semaines d’entraînement en hypoventilation. En revanche, si la méthode peut avoir des points communs avec un entraînement en altitude, elle n’en n’a pas tout a fait les mêmes effets. En particulier, il ne faut pas s’attendre à une augmentation du nombre de globules rouges. Cette adaptation ne se produit qu’après une longue période d’exposition à l’altitude.

Intérêt de la méthode

L’entraînement en hypoventilation est avantageux pour tous les sportifs qui doivent réaliser des efforts intenses de courte et moyenne durées, de manière continue ou répétée comme ceux pratiqués en aquabiking.

L’acidose est en effet le principal facteur responsable de la fatigue dans ce type d’effort. En réduisant le niveau d’acidité, l’entraînement en hypoventilation permet a l’aquabikeurs(euses) d’aller plus vite.

La méthode peut être appliquée dans de nombreuses autres disciplines sportives : course de demi-fond (jusqu’au 3­000m), natation, cyclisme sur piste, sports de combat, sports collectifs, sports de raquette ou encore sports nautiques (aviron, canoë-kayak).

Un autre avantage de l’entraînement en hypoventilation est de solliciter l’organisme de manière importante sans avoir obligatoirement recours à des exercices de haute intensité, plus traumatisants pour l’appareil locomoteur.

Les aquabikeurs(euses) en phase de rééducation après une blessure, ou qui souhaitent ménager leurs muscles, tendons et articulations, pourront ainsi effectuer des entraînements stimulants en se déplaçant à vitesse lente ou modérée.

Enfin, pour les spécialistes des sports d’endurance, les études n’ont à ce jour pas mis en évidence de réels bénéfices pour la performance au niveau de la mer. Cependant, cet entraînement pourrait présenter un intérêt pour préparer une compétition en altitude. Ce champ de recherche devrait être investigué rapidement.

aquabiking groupe

Application

L’entraînement en hypoventilation est une méthode très éprouvante physiquement et mentalement !

Néanmoins, son application ne doit pas s’apparenter à une séance de torture ! Voici quelques conseils pour l’aborder efficacement et en toute sécurité :

● Avant de démarrer une période d’entraînement en hypoventilation, assurez-vous que vous êtes en bonne condition physique et que vous ne souffrez pas de problèmes cardiaques ou pulmonaires. S’il est bien appliqué, ce type d’entraînement ne fait pas courir de risques pour la santé. Cependant, il peut poser quelques problèmes chez les personnes prédisposées à certaines pathologies.

● Une séance en hypoventilation s’organise un peu comme un entraînement en fractionné. Il faut réaliser des séries (généralement comprises entre 4 et 8 ­minutes) dans lesquelles sont alternées des périodes en hypoventilation et des périodes en respiration normale. Dans chaque série, on peut par exemple choisir de faire du 15 secondes/15 secondes (hypoventilation/respiration normale) du 30’’/30’’, du 45’’/15’’, du 60’’/30’’, du 60’’/15’’, etc…

● L’écueil dans lequel il ne faut pas tomber est de chercher à bloquer sa respiration le plus longtemps possible pendant les périodes d’hypoventilation. Ce type de pratique mènerait très vite à l’épuisement et pourrait, dans une certaine mesure, exposer à quelques risques. L’hypoventilation n’est pas un concours d’apnée ! On peut obtenir des effets efficaces avec des blocages respiratoires de 3 à 4 ­secondes. De plus, ne cherchez pas à expirer un maximum d’air avant les blocages respiratoires. L’expiration doit se faire naturellement, sans forcer.

● Utilisez des vitesses de déplacement lentes ou modérées. Hypoventilation et vitesses excessives ne font pas bon ménage. Adapter le tempo musical et choisissez astucieusement le titre de la chanson ! Essayez si possible de contrôler votre fréquence cardiaque en cours d’effort. Celle-ci ne devrait pas être supérieure à 80-85 % du maximum.

La durée totale des séries en hypoventilation ne devrait pas dépasser 20-25 minutes.

Échauffez-vous à intensité légère avant votre travail en hypoventilation et faites une petite récupération à vitesse lente après.

● Au moment où on effectue un entraînement en hypoventilation, des maux de tête peuvent parfois se faire sentir. Ces maux de tête peuvent notamment survenir si les séries, les périodes en hypoventilation ou les blocages respiratoires sont trop longs. La sensibilité à ce type de désagrément étant différente d’un individu à l’autre, il faudra sans doute adapter son travail pour ne pas avoir à les subir. Dans tous les cas, si vous ressentez des maux de tête intenses, des palpitations ou une douleur inhabituelle dans la poitrine, il est fortement recommandé d’arrêter tout effort immédiatement !

 

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Par le docteur Woorons, Physiologiste du sport.